Plongez avec nous au cœur des enjeux de la transformation numérique d’ARTELIA en relisant notre dossier paru au mois de Juin 2020 dans Renc’ART notre revue du confinement.
Une transformation numérique réussie c’est quoi ? Comment on fait ? S’agit-il d’égrainer un inventaire à la Prévert d’outils digitaux, censés aider les salariés, dans une sorte d’ivresse technophile ? Ou bien faut-il décider verticalement et sans concertation de faire une confiance aveugle aux géants du numériques ? On distingue plusieurs attitudes des directions pour la conduite de ces changements : de la marche forcée (sans les équipes et même parfois contre leurs attentes) à la négociation, en passant par la passivité. L’absence de négociation au sein d’ARTELIA traduit la difficulté de la direction à remettre en cause ses pratiques managériales. En particulier, le fonctionnement pyramidal.
Nous pensons, au contraire, que pour bien réussir sa transformation numérique, chaque salarié doit être formé et informé des enjeux. Les instances représentatives du personnel ont un rôle central dans ces choix et ces orientations stratégiques. Le consulter pour faire émerger des solutions partagée, alternatives et réellement au service des conditions de travail devrait être le socle de la démarche. Le développement du numérique, et l’introduction de ses outil,, dans les entreprises bouleversent en effet leur organisation et leur fonctionnement, et changent les conditions de travail des salariés. Le rythme de ces évolutions s’accélère. Le numérique est synonyme de dématérialisation et de désynchronisation pour l’activité productive, mais aussi synonyme d’immédiateté dans les processus et les rapports au travail. Il induit :
- Un éclatement des unités de lieux et de temps ;
- La dématérialisation du poste de travail et le développement du travail nomade;
- Un accroissement des tensions entre autonomie et contrôle;
- Une redéfinition du périmètre des métiers et de leur contenu.
Ce nouveau cadre spatio-temporel et d’autonomie contrôlée nécessite de redéfinir les nouveaux cadres de régulation des espaces de travail. Dans le même temps, face à l’accélération des changements et à la fragmentation des tâches, les salariés souhaitent retrouver du sens et de la cohérence dans leur activité professionnelle.
Les 4 fondamentaux d’une transformation numérique réussie
Stabiliser les organisations et procéder par expérimentation
Le passage en mode numérique, avec un flux de tâches et de demandes internes ou externes de plus en plus conséquentes, nécessite d’anticiper la montée en charge de l’activité qui résulte de la conjonction de plusieurs facteurs s’ajoutant les uns aux autres : dématérialisation des tâches, modification des processus de traitement, logique apprenante à la fois pour les salariés et les clients, gestion de personnels n’ayant pas la même faculté d’adaptation aux nouveaux outils numériques… Dans un contexte déjà instable des organisations, engager la transformation numérique des processus de travail, du contenu des métiers et des postes de travail sans stabiliser les organisations est périlleux.
Utiliser l’expérimentation et découper par phase les évolutions, en séquençant les étapes sans les juxtaposer, représenterait un plus pour la qualité de vie au travail et produirait moins d’exclusion.
Relaxer le temps de travail et rendre le droit à la déconnexion effectif
L’intensification du travail est une réalité largement partagée. Charge de travail allant crescendo, durée du temps de travail sans réelle délimitation, disponibilité augmentée, logique d’immédiateté pour les réponses attendues, etc. L’activité professionnelle se résume à courir sur un rythme de 100 mètres un marathon. Des stratégies personnelles sont mises en place pour faire face et gérer ces contraintes, notamment en utilisant les « temps morts » dévolus normalement aux pauses, aux temps de repos ou à la vie privée. Départ plus tôt, travail à domicile, traitement de la messagerie professionnelle pendant les transports, etc. Pour rendre effectif le droit à la déconnexion, il est nécessaire d’étudier en amont de chaque projet la charge de travail réelle prévisible, à la fois individuelle et collective. Rappelons que réduire le temps de travail réel permet d’accroître la productivité horaire. La spécificité de certaines grandes agglomérations nécessiterait de travailler à une prise en compte de tous les temps de déplacements afin d’augmenter l’autonomie et/ou favoriser la proximité résidentielle. L’aspiration au télétravail à domicile et dans des lieux tiers (sur la base d’un ou 2 jours par semaine) s’explique aussi par ce contexte.
Un management basé sur l’intelligence collective
Il s’agit de favoriser l’intelligence collective dans les organisations de travail en utilisant les possibilités de communication et d’activité collective toujours plus grandes. Cela passe par un mode de fonctionnement favorisant la décentralisation des savoirs et des pouvoirs ; le développement de l’autonomie des individus, reconnus pour leur expertise, et valorisés en tant que créateurs de sens. L’interactivité entre les membres de la communauté de travail permettant simultanément que les savoirs individuels soient collectés et circulent pour être partagés et augmentés par chacune et chacun. Les apprentissages sont à la fois individuels et collectifs. Développer la cognition partagée et le retour d’expérience dans un contexte professionnel complexe, c’est favoriser la capacité d’un groupe à collaborer pour construire ses propres solutions adaptées à une situation donnée. Ces formes d’organisation apprenantes valorisent la part de chacune et chacun dans la communauté de travail et augmentent l’efficacité des organisations.
Favoriser le droit d’expression et la qualité du dialogue social
Les conditions de travail laissent peu de place pour les temps d’échanges au sein des équipes et entre les équipes. Or, il est nécessaire de libérer du temps pour favoriser ces temps d’échanges afin de mieux répondre aux nouvelles questions relatives aux conditions d’exercice professionnel qui se posent avec les transformations en cours. Le développement de certaines formes de précarité montre la nécessité de définir un cadre garantissant un minimum de droits sociaux (droit du travail, protection sociale, éthique professionnelle, etc.), notamment pour celles et ceux qui échappent à une forme d’emploi stable. Ces nouveaux droits sont nécessaires pour garantir l’exercice de la liberté d’expression, l’éthique professionnelle et la qualité du travail. Autre axe fondamental, la libération de temps pour l’exercice du droit syndical afin d’améliorer la qualité des relations sociales et le dialogue social. Élaborer les réponses adéquates aux évolutions en cours nécessite de s’inscrire dans une logique de co-construction et de co-innovation pour atteindre l’objectif de cohésion sociale au sein des communautés de travail.